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Mots clés : Brèves, M2_EMTE
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Herbier et détail de Posidonia oceanica. doris-ffessm.fr © Jean-Georges Harmelin et Philippe Perrier


Vous connaissez probablement la forêt amazonienne et son rôle de “poumon vert”, mais connaissez-vous les prairies de posidonie (Posidonia oceanica) ?
Marta Solé et son équipe[1] étudient cette espèce de plante à fleur sous-marine, endémique de Méditerranée. Les herbiers qu’elle forme sont de véritables poumons verts marins, des prairies aquatiques qui abritent une biodiversité riche et servent notamment de nurserie pour de nombreuses espèces de poissons. Menacée par les aménagements côtiers et la pollution, c’est une espèce protégée : la destruction, la vente ou l’achat d’une partie ou de l’ensemble de cette plante sont strictement interdits. Malheureusement, les scientifiques ont mis en évidence un nouveau et étonnant danger : la pollution sonore d’origine humaine.
L’équipe de scientifiques a observé des cellules racinaires de posidonie qui possèdent des amyloplastes, des structures intra-cellulaires capables de stocker de l’énergie sous forme de grains d’amidon[2]. De plus, elles exercent une fonction similaire à celle des cellules auditives des animaux. Sous l’effet de la gravité, les grains d’amidon font pression sur le bas des cellules racinaires, orientant ainsi leur croissance dans le sens de la gravité, leur permettant ainsi de s’ancrer solidement dans le sable.
Lorsque les plantes sont exposées à des sons (50 à 400 Hz, soit des fréquences proches de sons produits par les activités humaines), les grains d’amidon s’altèrent et certains subissent une dégradation complète. Selon les scientifiques, cela pourrait compromettre la capacité de la plante à s’enraciner correctement dans le sol, la rendant alors vulnérable ainsi que tout l’écosystème qui y est associé.
Les scientifiques ont également décelé la présence de plastoglobules suite à ces expositions sonores : ce sont de véritables agents de crise, se comportant comme des navettes qui transportent des composés de défense contre les agressions extérieures. Des membranes organiques s’accumulent aussi dans les cellules, résultat de ce bazar intra-cellulaire.
Ainsi, bien que la mer paraisse sourde au brouhaha des humains, la cacophonie des moteurs de bateaux, forages off-shore et autres sonars pourrait bien affaiblir encore plus les écosystèmes marins. Alors, à quand des casques antibruit pour la posidonie ?

[1] Solé, M., Lenoir, M., Durfort, M. et al. Seagrass Posidonia is impaired by human-generated noise. Commun Biol 4, 743 (2021).https://doi.org/10.1038/s42003-021-02165-3
[2] Rairth, E, Vaz, N., Da Rocha, L. Poképlastes : différenciez-les tous ! https://bionum.u-paris.fr/pokeplastes-differenciez-les-tous/