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Mots clés : Bionum, Brèves
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Nous allons vous raconter le procès réalisé après la mort inattendue de Karine, une jeune arabette des dames. Elle avait été retrouvée morte dans son pot à l’heure où ses camarades n’avaient pas encore fleuri. Des traces de pétales de fleurs sur la scène de crime avaient été retrouvées et avaient mis les enquêteurs sur la piste de Frigida, une protéine impliquée dans la floraison des plantes.

Dessin d'audience de la comparution de l’accusé Frigida (à droite), représenté par son avocat de la défense. Le Jardi-juge interroge ce dernier. Au fond à gauche, les sœurs de Karine, éplorées.
Dessin d’audience de la comparution de l’accusé Frigida (à droite), représenté par son avocat de la défense. Le Jardi-juge interroge ce dernier. Au fond à gauche, les sœurs de Karine, éplorées.

L’audience eut lieu quelques semaines après le décès de la victime. Plusieurs témoins et camarades de la victime étaient présents ainsi que le suspect principal, la protéine Frigida, ses témoins, et son avocat. Le procès était dirigé par le jardi-juge, un juge spécialiste en floraison.

Ce dernier commença par rappeler à l’audience le contexte de l’enquête. Karine avait commencé à fleurir au mois d’avril, ce qui est normalement impossible car les arabettes des dames sont des plantes qui font de la vernalisation, elles  nécessitent donc de passer l’hiver avant de fleurir. Ces plantes sont également des plantes annuelles, c’est-à-dire qu’elles meurent après avoir fleuri. La mort de Karine était donc inévitable et le suspect principal ne pouvait être que la protéine Frigida impliquée dans le processus de vernalisation.

Le jardi-juge lança le début de l’audience, il appela à la barre le procureur chargé de l’enquête pour énoncer les résultats de l’enquête qui avait été menée. Les protéines activatrices de la floraison FD et FT avaient lancé le processus de floraison car leur patronne, la protéine FLC, n’était pas venue les en empêcher, celle-ci dormait. En effet, cette protéine est normalement réveillée par la protéine Frigida et ses collègues mais ces dernières ne l’avaient pas fait car Frigida manquait à l’appel. 

Après avoir annoncé tous les éléments de l’enquête, le procureur déclara donc que Frigida était la principale suspecte pour la floraison et par conséquent la principale suspecte du décès précoce de la jeune arabette des dames: Karine.  

Après cette intervention, le jardi-juge appela à la barre l’avocat de Frigida qui défendit sa cliente. Il dit que Frigida était une protéine très dévouée et rigoureuse dans son travail. Il annonça à l’audience que sa cliente ne pouvait qu’être malade. Il avait d’ailleurs fait appel à un médecin séquenceur pour analyser la séquence dont était issue la protéine Frigida. Ce dernier avait détecté une mutation rendant Frigida inapte à rejoindre ses collègues pour aller réveiller FLC. 

Frigida était donc bel est bien coupable de la mort de la jeune plante mais cela était dû à une maladie et le crime n’était pas volontaire. 

Le procès touchait à sa fin et le jardi-juge conclut que Frigida était déclarée coupable de planticide involontaire. 

Comme la cour avait reconnu des circonstances atténuantes, Frigida n’allait pas être emprisonnée mais condamnée à certains travaux d’intérêts généraux, comme la participation à des recherches scientifiques, notamment sur la vernalisation des plantes. 


Pour en savoir plus sur la vernalisation, ou quand la floraison apparaît après le passage de l’hiver :

https://www.pourlascience.fr/sd/biologie-vegetale/comment-le-froid-permet-la-floraison-des-plantes-12396.php

https://www.lpcv.fr/Documents/Pour_La_Science.pdf

Pour mieux comprendre l’interaction des différents gènes de la floraison :

Schéma page 15 : https://d-nb.info/1023946963/34 (Figure par Crevillen and Dean, 2011)

Illustration : Camille Godi 

Référence :
Crevillén, P., & Dean, C. (2011). Regulation of the floral repressor gene FLC : The complexity of transcription in a chromatin context. Current Opinion in Plant Biology, 14(1), 38‑44. https://doi.org/10.1016/j.pbi.2010.08.015